Elle a beau avoir déjà interprété ce rôle, on est certain qu’elle ne radotera pas… Quatorze ans après avoir joué la maîtresse de cérémonie du Festival de Cannes, Monica Bellucci ressort ses escarpins et ses plus belles robes de soirée pour inaugurer et clôturer la quinzaine cinéphile qui, chaque printemps, aimante les regards de tout l’univers. Une partition qui lui va comme un gant, voire comme deux gants, et pas seulement parce que son capital séduction exponentiel correspond en tout point à l’image glamour associée à la grand-messe cannoise.
La tête et les jambes…
Depuis ses débuts au cinéma dans les années 1990, l’ancien mannequin et égérie Dolce & Gabbana mène une sorte de double carrière. Un joli pied dans l’industrie du divertissement où son sex-appeal affole les compteurs du box-office. L’autre dans un cinéma d’auteur exigeant, qui témoigne de sa passion pour les aventures inédites.
Dans la première catégorie, Monica Bellucci a promené sa silhouette aimable en tout et sa beauté brune de tous les diables dans des comédies populaires (Astérix et Obélix : Mission Cléopâtre), des films de S-F cultes (Matrix) et des sagas populaires tels les James Bond. Sa prestation dans 007 Spectre, de Sam Mendes, lui a valu l’honneur de devenir une James Bond Girl à cinquante ans passés, ce qui tend à démontrer que le cinéma, enfin, ne jette plus forcément dans ses oubliettes les ravissantes actrices une fois qu’elles ont franchi la barre prétendument fatidique des quarante ans !
Rayon auteur, loin de l’entertainment, Monica a donné de sa belle personne, de sa voix sensuelle et de son regard de braise dans des fictions radicales et singulières. En tête de liste, Les Merveilles d’Alice Rohrwacher, grand prix – tiens, tiens ! – du Festival de Cannes en 2014, ou encore Un été brûlant, du très austère Philippe Garrel, un cinéaste qui – encore un hasard ? – présente cette année à Cannes son nouveau film, L’Amant d’un jour.
Yes she Cannes!
Assumant son double statut de sex-symbol inoxydable et d’actrice qui pense et qui pense bien, Monica Bellucci baigne dans son élément naturel à Cannes, où l’on plébiscite dans un même élan œcuménique la frivolité et la cérébralité. En 2006, elle fut membre du jury sous la présidence de Wong Kar Waï : cette année-là, ironie, c’était sa moitié d’alors, Vincent Cassel, qui jouait les maîtres de cérémonie. Aujourd’hui, la belle et la pas bête jette un regard lucide sur le monde de l’Art qui, comme chacun sait, est aussi une industrie.
Dans le livre de dialogues avec le journaliste Guillaume Sbalchiero, qui sort opportunément en librairie ce mois-ci, Monica parle juste et bien. « Peinture, musique, littérature, cinéma : seul le temps atteste de la valeur d’une œuvre, médite-t-elle. L’instant est toujours soumis aux aléas, aux émotions, à un certain état d’esprit. Pour pouvoir jauger, il faut attendre. Passer après le public, les critiques, les modes… »
Sur la scène du palais des Festivals, à l’heure des cérémonies tant attendues, on guettera forcément son dialogue avec le président du jury, Pedro Almodovar, un cinéaste qui sait mieux que personne honorer les jolies femmes dans ses films. Monica Bellucci, reine de Cannes en mai, n’en oublie pas pour autant le cœur battant de son beau métier d’actrice. La preuve : on la retrouvera le 12 juillet dans le nouveau film d’Emir Kusturica : On the Milky Road. Une autre aventure en terre de cinéma, chez elle.
1. Rencontres clandestines, de Guillaume Sbalchiero et Monica Bellucci. Éditions de L’archipel, 15 €. Sortie le 10 mai.