Food : le goût de Pâques

Si Noël a sa bûche, Pâques a ses œufs et son agneau. Les traditions ont du bon et perdurent. S’inspirant de quelques ingrédients phares – œuf, agneau, asperges, légumes primeurs, chocolat et autres nids de Pâques –, quatre chefs nous livrent leur vision très personnelle de la saison, parfois loin des sentiers battus, mais sans jamais oublier les fondamentaux qui animent cette fête de famille.

Anne Debbasch

La cuisine de Pâques reste avant tout un moment de partage et de communion, quels que soient les pays et les religions. Les cuisines regorgent de légumes primeurs croquants et parfumés ; les œufs retrouvent une place de choix ; l’agneau s’impose sur les tables en petites côtelettes rosées délicieusement grillées ou en généreux gigot à partager.

On retrouve aussi avec délice le fameux « pâté de Pâques » ou « pâté berrichon ». Une spécialité régionale printanière incontournable, que Yohan Lastre et sa compagne Marion Sonier remettent chaque année au goût du jour dans leur boutique Lastre Sans Apostrophe, le réinterprétant dans un moule en cuivre sur mesure d’une incroyable modernité à l’effigie des statues moaï de l’île de Pâques.

Extrait de Pâté en croûte, éditions Marabout. Crédit photo : David Japy

Si ce pâté est traditionnellement constitué d’une farce à base de porc et de veau ; d’échalote ; de persil et d’œufs entiers disposés dans une pâte brisée ou feuilletée, Yohan Lastre n’utilise que le porc pour la farce et des suprêmes de poulet pour la farce fine qu’il dispose dans une pâte brisée avec des œufs entiers pour un résultat proche de la gourmandise d’un dessert. « C’est une spécialité typiquement régionale. J’aime le servir en entrée à Pâques, même si on peut également l’apprécier en plat. Pour le déguster, il est important de le laisser revenir à température ambiante. »

Honneur au jardin

Amandine Chaignot, quant à elle, n’est pas insensible au retour du printemps, et ses souvenirs d’enfance refont surface. Au Café de Luce, à Montmartre, c’est au jardin qu’elle puise son inspiration. Elle met ainsi à la carte une entrée d’asperges Mimosa. Une alliance d’asperges vertes encore craquantes parsemées de petits filaments d’œuf dur et de copeaux de radis ; le tout assaisonné d’une vinaigrette aux herbes nouvelles.

 
 
 
 
 
Voir cette publication sur Instagram
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

Une publication partagée par Amandine chaignot (@amandinechaignot)

En plat, rien de mieux qu’une épaule d’agneau confite au four toute une nuit avec thym et échalotes. « C’est un souvenir au goût d’enfance, un plat familial que je me plais à proposer à la carte du restaurant. » La viande ultrafondante est accompagnée d’un risotto de petit épeautre et des premières morilles. En dessert, impossible de faire l’impasse sur le chocolat, qui vient trouver sa place dans une tarte rustique maison.

Inspirations de Pâques

Pâques est aussi synonyme de traditions venues d’ailleurs et d’inspiration à tout va. Chez Bazurto de Juan Arbelaez, la Colombie s’invite à Paris et, avec elle, le goût de Pâques et de la fête. Au programme donc de l’ambiance et l’appel d’un repas festif et parfumé. Si l’agneau confit aux agrumes s’invite tout naturellement à table, les poissons sont aussi de la partie, servis en plat de partage.

Clin d’œil au Pirarucú a la patarasca de la jungle amazonienne, Juan Arbelaez choisit de mettre à l’honneur le maigre, qu’il cuit à la braise avec du suero, un fromage aigre très apprécié pour ses notes lactiques. Enveloppé dans une feuille de bananier, la braise saisit les chairs du poisson en douceur pour leur donner ce goût incomparable et envoûtant de brasero. Pour l’accompagner, quelques bananes plantains à la douce sucrosité.

 
 
 
 
 
Voir cette publication sur Instagram
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

Une publication partagée par Juan Arbelaez 🇨🇴 🇨🇵 (@juanarbelaezchef)

Pour le dessert ou pour le goûter, il replonge en enfance avec le chocolat chaud au queso campesino ; un fromage frais servi en dés que l’on fait fondre dans le liquide fumant. « J’aime retrouver ce côté sucré-salé, et la texture que donne le fromage au chocolat chaud. Chez moi, on le sert avec un pain au maïs ou au manioc. » Et comme chaque jour est une fête en Colombie, le lendemain de Pâques, Juan réalise un gâteau au chocolat singulier avec tous les petits œufs qui n’auraient pas trouvé preneur ! Un dessert régressif à souhait.

Mélange des genres

Quittons le goût de la Colombie pour découvrir ceux de la Franche-Comté et du Vaucluse du jeune chef Michaël Gamet chez Mâche, au cœur du Xe arrondissement parisien. Sa cuisine inspirée propose des assiettes déstructurées, aux associations inattendues. « Pour Pâques, je m’inspire de mes souvenirs dans le sud de la France ; une cuisine du jardin très aromatique où l’on conçoit les plats avec ce que la nature nous propose. »

Ainsi, pour son entrée, il met à l’honneur les premiers melons de Cavaillon. Les tranches sont rôties à la poêle avec zestes de citron vert ; thym ; citron et miel de fleur pour créer un bouquet floral très aromatique. En contraste, le fruit est accompagné d’un condiment plein de peps pensé à la manière d’un cocktail avec raisins de Corinthe marinés dans un jus de citron parfumé à la cardamome verte et à l’Angostura, très apprécié pour son amertume et sa légère acidité.

 
 
 
 
 
Voir cette publication sur Instagram
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

Une publication partagée par Michael Gamet (@michaelgamet_)

Impossible pour cette assiette de faire l’impasse sur les jeunes pousses de printemps avec mélisse ; tagette ; estragon du Mexique et pousses de moutarde pour twister la douceur du melon rôti de leurs notes végétales et fraîches. Le coup de pinceau final est apporté par une touche de Gwell, cette crème aigre épaisse et acidulée, rehaussée d’olive Taggiasche et de pickles de graines de moutarde.

Casser les codes

Si l’agneau reste un incontournable pour le plat, c’est au dessert que le chef casse les codes avec une explosive assiette de chocolat assaisonnée aux morilles. « L’idée m’est venue du Mexique, où le chocolat est consommé avec du piment, du sel, du poivre, des champignons. »

L’assiette est une superposition de goûts et de textures qui fonctionnent en équilibre entre la gourmandise de la noix de coco et des noisettes et les parfums de sous-bois des champignons. Le chocolat noir extra bitter, travaillé en siphon avec, en embuscade, la morille infusée, vient pousser les goûts ; la poudre d’oxalis, fraîche et acidulée, apportant la touche finale à ce dessert détonnant. L’arrivée du printemps et des fêtes de Pâques signent définitivement le renouveau de la nature et des assiettes. Joyeuses Pâques !

Les adresses à retenir

Lastre Sans Apostrophe, 188 rue de Grenelle, 75007 Paris. lastre-sans-apostrophe.business.site

Café de Luce, 2 rue des Trois Frères, 75018 Paris. cafedeluce.com

Bazurto, 5 rue de l’Ancienne Comédie, 75006 Paris. bazurtorestaurant.com

Mâche, 61 rue de Chabrol, 75010 Paris. mache.restaurant

Lire aussi : L’œuf de Pâques, c’est sacré !

Partager cet article

A lire aussi
Olympiae 2024

On a testé pour vous Olympiae 2024

Pour fêter les Jeux olympiques qui se tiendront cet été à Paris, les clubs de sports s’amusent à imaginer des cours qui mixent plusieurs disciplines. On a testé Olympiae 2024 à L’Usine Saint-Lazare.

L’univers très arty de la Maison Glenfiddich

En donnant carte blanche au collectif Obvious, qui développe des algorithmes générateurs d’œuvres d’art, la Maison de whisky Glenfiddich met une nouvelle fois les artistes à l’honneur et nous propose un regard nouveau sur ses savoir-faire. Explication avec Lauriane Curci, Head of Marketing & Cultural Partnerships au sein de Glenfiddich France.

parfums printemps 2024

Parfums : quoi de neuf ce printemps 2024 ?

Le parfum devient historique, une Maison renaît, la génération Z veut être riche et on enfile les nouvelles créations comme des pulls sur une peau nue. C’est tentant, déboussolant, addictif. On aime.

bon marché tous fadas

Bon Marché : tous fadas sur la rive gauche !

On l’attend chaque année avec impatience : l’installation estivale du Bon Marché sera en place à partir du samedi 27 avril. Et cette fois, c’est dans la cité phocéenne qu’on est conviés à prendre nos quartiers d’été.