Le fuseau au sommet

Impulsant sa révolution sportive et esthétique au milieu des skieurs et des stars, ce best-seller des pistes a opéré une échappée libre vers les villes. Aujourd’hui encore, il continue sa cour, imperturbable à la façon du pantalon idéal.

 

Judith Spinoza

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Fuseau Fusalp

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Sport chic, à la neige comme à la ville

En poussant un peu le bouchon, on pourrait dire que le fuseau est un classique du vestiaire, au même titre que le smoking, la petite robe noire ou le jean, puisqu’il allonge les jambes de ses adeptes depuis sept décennies. Jetez un œil aux collections 2019-2020 des griffes de sportswear chic, vous le verrez, à peine transformé, tout juste revisité dans sa technicité. Taillé pour la ville chez Fusalp, qui fut la première marque à le développer en Stretch, technique chez Rossignol, il trace sa ligne élancée comme il le faisait dans les années 1950-1960, gainant les silhouettes de Jeanne Moreau ou Catherine Deneuve. C’est oublier que certains n’avaient pas parié sur ce pantalon fuselé, qui est aussi le premier vêtement technique du skieur. À l’époque, comme le disait si joliment Raymond Barbas, beau-frère de Jean Patou, le couturier inventeur du sportswear chic, « les tenues de ski sont beaucoup mieux adaptées au bar du palace qu’aux pistes neigeuses ». Heureusement, en 1930, l’invention du fuseau par la Maison AAllard change la donne : ajusté et tendu, épousant la silhouette, en plus de révolutionner la pratique du ski, il permet d’unir enfin le sport et le style. En 1926, Armand Allard ouvre son atelier de tailleur au cœur de Megève, place de l’Église. Quatre ans plus tard, pour répondre aux exigences techniques du skieur Hilaire Morand, parent du grand champion Émile Allais, il invente le « pantalon sauteur » et détrône le pantalon norvégien alors usité. Aérodynamique, gainant fesses et jambes, possédant un élastique sous le talon – chez les femmes aussi –, ce legging d’hiver incarne une mode décontractée et pratique, aux antipodes de l’allure militaire des costumes de ski féminins des années 1940. Plus encore, dès 1948, il devient, avec l’anorak, l’une des pièces incontournables de l’uniforme du skieur et s’impose même comme la tenue officielle des JO de la même année, conçue par André Ledoux.

Le fuseau idéal

« Le fuseau idéal ? Je le conçois et l’exige imperméable, c’est pourquoi je le fais faire en gabardine très serrée […] », annonce-t-il dans le magazine Elle en novembre 1949. « Il est important d’avoir un fuseau muni de poches à fermetures à glissière pour éviter que votre argent et votre rouge à lèvres ne s’éparpillent à chaque bûche ». Voilà pour l’anecdote. « Au début, c’était un vêtement purement sportif dont la technicité a fait le succès. C’était la première fois que l’on portait attention à l’aérodynamisme », précise Antoine Allard, héritier de la troisième génération. Par la suite, le ski se démocratise et se féminise, en même tant que se développent des magasins spécialisés. Sur les pistes, élégance rime dès lors avec allure sportive, voire olympique. Investissant les terrasses au cours des années 1960, le fuseau devient un pantalon d’après-ski immortalisé par Brigitte Bardot en voyage de noces avec Roger Vadim à Megève. « Mais, reprend Antoine Allard, s’il quitte les pistes, il ne quitte pas la montagne. Le fuseau n’a connu qu’une courte éclipse dans les années 1970 avant d’être relancé la décennie suivante par Jean Paul Gaultier, Hermès ou Daniel Hechter, qui le font défiler sur leurs podiums. Il devient le vêtement dernier cri, à porter en gabardine, en velours, en Lycra, uni ou imprimé. » En effet, au milieu des combinaisons à nouveau glamour et féminines de Thierry Mugler et Montana, le fuseau retrouve rapidement sa place. Mieux encore, il est détourné de sa vocation sportive et « remis à la mode en ville en 1980 par le style Ska. De Chantal Thomass à Élisabeth de Senneville, de France Andrevie à Enrico Coveri, le fuseau est le best-seller des collections ». Triomphant à la neige comme à la ville, il s’impose comme modèle d’élégance.

Garder la ligne

Grâce à sa courbe seyante, le fuseau fait autorité. Intemporelle, mais pas immuable, sa ligne évolue sous le coup des innovations techniques. En 1948, Henry de Charles Roux incorpore une fermeture Éclair et un soufflet dans la couture extérieure du pantalon permettant de pallier le manque de souplesse, garantissant une meilleure étanchéité, mais surtout, l’exercice physique passé, de rendre au fuseau « cette parfaite tension qui fait son chic ». Adopté par la haute couture, il se porte encore plus près du corps : en 1946, Hermès égaye sa silhouette noire d’une bande de laine à décor tyrolien, avant de proposer, un an plus tard, une coupe « incurvée », moulant encore plus le mollet. Les années 1950 modifient encore sa ligne : plat devant, épousant parfaitement les hanches, agrémenté d’une fermeture Éclair sur le côté. Après le drap de Bonneval, la gabardine, la tricotine, l’Elastiss à son tour permet de poursuivre le galbage toujours plus poussé de la jambe. « Les rédactrices de mode conseillent de vrais équipements avec une ligne serrée près du corps. Toutefois, si pulls et anoraks sont courts et bien moulants, le fuseau reste encore assez lâche aux cuisses et très serré à la cheville pour permettre de lacer au plus près les chaussures. On raffole des imprimés noir et blanc, comme des imprimés plus fleuris. Au fil des saisons, de 1960 à 1966, fuseaux et anoraks deviennent plus moulants grâce à la fibre Hélanca et les ensembles super Elastiss (comme le fuseau blanc de Pucci, agrémenté d’un blouson ou d’un pull torsadé) galbent les silhouettes des James Bond Girls des neiges », relate Diane-Élisabeth Poirier dans son ouvrage Le Ski et ses codes (La Table Ronde). Clairement technique et sportif, en matière biextensible, le voilà qui s’affiche telle une seconde peau chez Moncler, Rossignol, Duvillard et Fusalp (le premier à l’imaginer en Stretch) en 2000. Dictature de la minceur ? Que nenni ! « Sa coupe fuselée gomme les formes et valorise toutes les silhouettes », rétorque Antoine Allard. « De deux centimètres trop long, il est mal tendu, de deux centimètres trop court, il est inconfortable. » Alors, ferez-vous du ski cet hiver ?

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Brigitte Bardot

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Fuseau AAllard

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