Omar Sy, soigne notre optimisme

« Tout bien portant est un malade qui s’ignore… » Omar Sy revêt le costume de Knock dans une jolie version revisitée du texte de Jules Romain. En jouant les médecins, il nous livre son diagnostic sur notre société en mal de simplicité.

Aude Bernard-Treille

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Après Louis Jouvet et Fabrice Luchini, cela fait quoi d’être le nouveau Knock ?
Quand j’ai accepté, je ne savais pas qui était Knock. Je ne l’ai pas étudié à l’école, ou alors je n’y étais pas ce jour-là… Par conséquent, j’ignorais qu’il avait été interprété par ces très grands acteurs que j’admire ! Sinon, je me serais barré en courant. Ma chance, c’est d’ignorer pas mal de choses, et cette naïveté me sauve. Ça m’oblige à avoir du courage. La pression vient ensuite.

Lorraine Lévy a pensé à vous dès l’écriture, car elle aimait votre « humanité, votre force singulière, votre fragilité, votre rayonnement ». Qu’est-ce que vous avez dû travailler pour livrer ce nouveau Knock ?
La diction. Dans ma formation d’acteur, je n’ai pas fait de théâtre et là, c’est un texte classique, ce n’est pas comme l’impro que je pratique d’habitude. J’ai travaillé la posture, la motricité, la façon de se tenir droit… C’était une totale composition.

Qu’avez-vous de commun avec votre personnage de Knock ?
J’essaye d’effacer le plus possible ma singularité, mais c’est vrai qu’il y a cette humanité dans laquelle tout le monde peut aussi se retrouver. Chacun de nous a une envie impérieuse de sortir de sa condition, on veut tous dépasser nos acquis et, dans cette quête, il arrive qu’on s’y perde en prenant les mauvais outils pour y parvenir. Cette envie de vouloir être accepté, de truquer un peu qui on est pour être admis par l’autre, cela crée des situations dans lesquelles j’ai pu moi-même me trouver.

Knock applique le conseil « dis à l’autre ce qu’il a besoin d’entendre ». C’est de la vraie politique ! Avez-vous déjà fait ça ?
Je l’utilise dans la vie de tous les jours car, quand on a envie d’être entendu, quand on sent que l’autre s’éloigne et qu’on perd son écoute, on y est obligé.

C’est quoi votre plus belle arnaque ?
Là, tout de suite, c’est ma vie d’aujourd’hui ! On me confie des rôles assez importants, j’ai la chance de pouvoir les choisir. Je suis acteur et, quand je regarde dans le rétroviseur – là d’où je viens, mes débuts –, j’ai l’impression que je suis encore en train de vivre sur une escroquerie ! Ma grande angoisse, d’ailleurs, c’est qu’on me démasque. Bon là, je viens de me dénoncer !

« Le bonheur n’est pas simple car, dans une époque où tout est compliqué, la simplicité n’a pas beaucoup de place. »

 

Sous vos traits, le Dr Knock devient plus tendre que l’original de Jules Romain. Est-ce que jouer quelqu’un qu’on déteste vous amuserait ?
J’ai découvert après coup quelqu’un de sombre, mal incarné, un monstre… et l’idée, c’était d’avoir le négatif de cela. Je ne sais pas si je saurais faire quelqu’un qu’on déteste, car je suis un optimiste et j’essaye toujours de voir la lumière en chacun. Pour jouer un personnage, il faut le comprendre. Après, on peut très bien détester quelqu’un de lumineux, mais je suis sûr que je ne pourrais pas jouer un individu entièrement sombre. De toute manière, un humain n’est jamais absolument dépourvu de lumière. À moins de jouer le diable en personne !

 

Adèle fait promettre à Knock « d’essayer d’être heureux », comme si ce n’était pas évident. Que pensez-vous de cette promesse ?
C’est très beau et je trouve cela magnifique. Ce sont ces moments de poésie qui me rendent fier de ce film. Le bonheur n’est pas simple car, dans une époque où tout est compliqué, la simplicité n’a pas beaucoup de place. Quand on dit une parole aussi naturelle que « sois heureux » ou « il faut la paix dans le monde », on va nous dire « OK, t’es gentil, toi ! » On passe pour un benêt qui dit des lieux communs, quelqu’un de trop consensuel. Pour que le bonheur soit apprécié, il faut se débarrasser de beaucoup de complications. Il faut au moins essayer d’être heureux, on peut y arriver. J’assume ce genre de discours, au risque de me faire traiter de con !

On ne vous a pas encore vu sur les planches. Est-ce qu’interpréter un personnage classique vous a donné des envies de théâtre ?
Le classique m’impressionne et, avec ce sentiment d’être une escroquerie, j’évite ce genre de choses. Si on doit me démasquer un jour, c’est là que ça se passe. J’y ai goûté un peu avec Chocolat, quand mon personnage interprétait Othello, mais je n’étais pas très à l’aise car je ne viens pas de là. Au théâtre, on ne peut pas improviser. C’est précis, il faut avoir une excellente diction, donc cet exercice me trouble. Mais j’adore jouer avec les acteurs qui ont ce bagage.

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Docteur Sy…

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Si vous aviez fait médecine, vers quelle spécialité vous seriez-vous orienté, et pourquoi ?
Vers tout ce qui est cérébral, donc psy ! Le cerveau et tout le système nerveux, qui est comme un arbre des pieds à la tête, me passionnent car c’est encore très mystérieux.

Le conseil bidon qu’un docteur vous a déjà donné ?
Je n’ai pas de mauvaise expérience de médecin, je n’y vais pas souvent. Néanmoins, je trouve qu’ils donnent toujours de l’aspirine ou un antibiotique pour tout. Surtout quand ils ne savent pas trop…

La pilule que vous avez du mal à avaler ?
Il y en a beaucoup trop… En général, elles ont du mal à passer chez moi car j’ai besoin de comprendre pour accepter. Et il y a trop de choses qu’on ne nous explique pas. Quand on nous dit que fermer les berges à Paris, ça va faire baisser la pollution, j’ai un peu de mal à l’avaler.

Selon vous, c’est quoi le mal du siècle ?
La communication. On veut tellement communiquer qu’on le fait mal. On a tout compliqué. On donne et on montre tellement d’infos qu’on en oublie l’essentiel et on se pollue de petits détails très nuisibles. On a créé des réseaux sociaux qui finalement nous isolent, on fait le contraire de ce qu’on voudrait.

Votre meilleur remède contre cela ?
En ce moment, je reviens aux basiques. Alors, souvent, je passe pour un vieux con ou un type un peu simplet car, par exemple, je regarde les infos à petites doses. J’ignore donc plein de choses volontairement. Mais, au moins, je ne me laisse pas polluer. Je suis plus heureux… Je préfère avoir le sourire.

Quand vous êtes à l’étranger, avez-vous le mal du pays ?
Oui, parfois, et, en même temps, j’ai la chance de voyager beaucoup. Je suis dans une période de ma vie où j’ai le meilleur des deux mondes. J’ai la bougeotte, je suis assez curieux. Quand je suis à un endroit, mon esprit n’est pas ailleurs. Le mal du pays, c’est quand on a le corps quelque part et l’esprit à un autre endroit. Le bonheur, c’est aussi profiter de l’instant présent sans être autre part, ou projeté dans le passé ou dans le futur. Quand on est à un concert, par exemple, cela consiste à écouter et à ne surtout pas passer son temps à filmer.

Si vous deviez nous prescrire quelque chose, que mentionnerait votre ordonnance ?
« Simplifions nos vies avec un truc simple par jour, une parole, un geste… » Aujourd’hui, on a trop de choix, on est malheureux car on a des schémas de vie trop compliqués. On doit choisir et, quand on a la force de le faire, on n’est pas satisfait. Par conséquent, on passe notre vie à se demander si on a pris les bonnes décisions, au lieu d’assumer et suivre sa route ! La simplicité devient rare.

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