Diane Ducret, Label intello

Élevée par un grand-père résistant, elle a connu le succès dès son premier livre, Femmes de dictateur, best-seller en France et traduit dans vingt langues. Diane Ducret a surtout une tête bien faite. Cette jolie fille nous présente son dernier roman, Les Indésirables.

Aude Bernard-Treille

Comment et quand vous êtes-vous intéressée à l’Histoire ?
Je n’ai pas spécialement de passion pour l’Histoire. Plutôt pour les grands sentiments humains, pour les héros, le tragique et le sublime qui sont révélés dans l’Histoire à travers des guerres, les obstacles à l’amour, les moments de douleur. Mes personnages évoluent donc dans ce cadre.

Votre premier succès avait pour sujet des femmes de dictateur. Qu’est-ce qui vous a poussé à écrire sur ce thème ?
C’est vrai qu’à vingt-sept ans, on ne s’attend pas à un tel récit. En cherchant auprès de tous ces dictateurs, qui ont eu sur la conscience le plus grand nombre de morts de l’humanité en organisant des systèmes de meurtres de masse, je trouvais pertinent de se demander s’ils étaient capables d’aimer. Et est-ce qu’une femme peut aimer un type comme Hitler ? Comment dire en tant que femme « bonsoir mon chéri, tu as passé une bonne journée ? » à Saddam Hussein ou Mussolini  ? Quelle est la force de l’amour face à la violence et à la destruction ? C’est une grande question, qui va des dictateurs aux pervers narcissiques.

Dans votre dernier ouvrage, vous décrivez la naissance d’une amitié dans un contexte très particulier, celui d’un camp. Il y règne tout de même la résistance, la joie et finalement la vie… Quelle est l’origine de cette histoire ?
Dans des archives, je suis tombée par hasard sur cette rafle des femmes indésirables en 1940, bien avant celle du Vel d’Hiv en 1942. Elle concernait toutes « les femmes étrangères sans enfant, à la fois juives et aryennes », en plein Paris. Elles ont été regroupées dans un camp français dans les Pyrénées. Elles y ont monté un cabaret où elles chantaient en allemand, en yiddish et en français. Je ne pensais pas que cela avait pu exister tant c’est dingue de l’imaginer. Et je trouvais cela hypermoderne. La couverture, c’est finalement un selfie de deux filles qui avaient fui, chacune différente mais qui cultivaient la joie et la légèreté. Finalement, c’est quoi être indésirable ? C’est quand on n’a pas fait les bons choix aux yeux de la société ? La femme, l’étranger, l’homosexuel sont les trois catégories maudites de tous les temps !

Qu’est-ce qui serait culturellement incorrect ?
Je trouve qu’on déifie trop la culture. Le musée doit être un lieu de liberté, le livre aussi. Dans mon livre, quand ces femmes veulent jouer du Shakespeare, l’une a peur d’écorcher le texte et demande si l’on a le droit de jouer approximativement. Une autre lui répond : « On a tous les droits lorsqu’il s’agit de rendre vivants les propos d’un auteur » et c’est vrai. J’écris sur les livres, je peux arracher une page si je veux, je trouve qu’il n’y a rien de sacré. On a le droit de salir la culture, de se l’approprier, de douter d’elle, de faire ce que l’on veut.
Ce que j’aime à Rome par exemple, où j’ai vécu, c’est que l’on mange sur des vestiges, on grimpe dessus, ils ne sont pas derrière des petites barrières, comme en France dans un musée. Les jeunes se mettent en maillot et bronzent ou mangent des sandwichs sur les œuvres, ils vivent avec. Nous avons besoin de cette audace vis-à-vis de la culture. C’est trop français de se fixer des limites vis-à-vis d’elle.

Vous avez une maîtrise d’histoire de la philosophie. Quel principe appliquez-vous en toutes circonstances ?
Une des phrases que l’on retrouve dans le livre. Celle d’Elsbeth Kassler, cette infirmière surnommée « l’ange de Gurs » qui disait : « Il vaut mieux allumer une lumière que de se plaindre de l’obscurité ».

Livre de chevet
Ma vie avec les chimpanzés, de Jane Goodall.

Auteurs favoris
Khalil Gibran, Camus, Saint-Exupéry.

Dernière découverte
Adolphe a disparu, d’Éric Metzger.

L’indispensable
Le Tao Te King de Lao Tseu, pour sa sagesse !

Musique en boucle
Pendant l’écriture, j’ai beaucoup écouté Yann Tiersen et un groupe génial mais moins connu, qui s’appelle Cigarettes After Sex. J’aime aussi Rock Around the Bunker de Gainsbourg.

Couverture_Les-Indésirables-diane-ducret

Les Indésirables, Flammarion, 2017,
320 pages, 19,90 €.

Au début de la Seconde Guerre mondiale, deux amies, l’une aryenne, l’autre juive, chantent l’amour et la liberté pour rester vivantes. Un récit magnifiquement écrit en quatre parties, qui raconte des moments de lumière dans une période sombre de l’Histoire.

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