Michael Pitt

À l’affiche du très attendu Ghost in the Shell, l’acteur cultive une image de bad boy et aime incarner des personnages difficiles, un gage de talent pour le cinéma américain. Rencontre.

Aude Bernard-Treille. Illustration Jérôme Meyer-Bisch

Qu’est-ce qui vous a séduit dans le scénario de Ghost in the Shell (GITS) ?
Quand j’étais ado, c’était d’abord un film d’animation assez underground [sorti en 1995, Ndlr]. Les bandes dessinées et tout cet univers un peu « nerds », manga, sciencefiction, étaient très à la mode, mais GITS était très en avance dans son genre. C’est assez courant aujourd’hui, mais il faut imaginer qu’il y a vingt ans, c’était très précurseur d’aborder des sujets existentiels. Il faut d’ailleurs voir l’original du Japonais Mamoru Oshii dans sa version japonaise sous-titrée. Vous pouvez lire aussi l’ouvrage, mais c’est très compliqué à aborder car je crois qu’il y a plus de dix tomes.

Étiez-vous intéressé par cet univers des mangas auparavant ?
Je ne connaissais pas beaucoup de choses sur tout cela, à vrai dire. C’était pour moi une simple VHS underground. C’est le premier film d’animation que j’ai vu qui soit destiné à un public adulte. On dit bien que « les gens qui cherchent des choses parviennent à les trouver ». Au-delà des images, il y a cette question forte : qu’est-ce qu’un être humain ?

Aviez-vous déjà lu des mangas ou pas du tout ?
J’ai lu quelques Akira par exemple, mais son oeuvre doit représenter plus de 5 000 pages ! [Akira est un manga cyberpunk, thriller politique de science-fiction, adapté à l’écran en film d’animation japonais en 1988 par Katsuhiro Ōtomo, Ndlr].

Qu’est-ce que ce tournage avait de particulier ?
En studio, tout est préparé, c’est toujours d’énormes décors dans lesquels il est impossible de se déplacer rapidement. Je dirais qu’avec GITS, c’était peut-être compliqué car il y avait une grosse production et donc beaucoup d’avis en même temps. Les lignes du script pouvaient parfois changer la veille des tournages.

Avez-vous été beaucoup dirigé ou avez-vous pu apporter un peu de liberté ?
Tout ce que j’ai proposé, je l’ai pris du manga original. Car toutes les contributions que j’essayais de donner servaient le plus justement l’histoire originale. Parce que beaucoup de gens n’ont pas lu le livre ou n’ont pas vu le premier film et que cette version sera leur première vision de GITS.

Comment vous êtes-vous préparé pour tourner ?
Je me suis beaucoup documenté sur tout ce qui a été fait autour de GITS. Et il y a énormément de choses entre le film, les séries, les livres… J’ai tout vu, mais je n’ai pas lu l’intégralité. J’ai aussi lu des magazines scientifiques sur des chercheurs qui construisent des robots, des études sur le cerveau, sur les évolutions scientifiques, sur la spiritualité et également sur la religion et son rapport à la science. Car l’histoire pose en fait des questions métaphysiques comme « Qu’est-ce qui distingue l’être humain d’un robot pensant ayant conscience de son existence ? », « Qu’est-ce qui fait la spécificité de la pensée humaine ? », « Que peut-on considérer comme “être vivant” ? ».

Ce tournage vous a donc permis pas mal de réflexions personnelles finalement ?
Oui, car ces débats de société vont avoir lieu de plus en plus souvent avec l’évolution de la science. Si vous êtes curieux de cela, de savoir où l’on place la frontière entre le corps et l’esprit, c’est un film extrêmement existentiel.

Pensez-vous que dans le futur, on puisse déplacer des cerveaux ? Voire les voler ?
Je suis assez surpris de voir à quel point on est proche de cela. Je pense qu’il y a des recherches là-dessus. J’ai réalisé rapidement, en me documentant, qu’on n’en était vraiment pas loin. Et bien plus que ce que j’avais imaginé.

Cela vous fait peur ?
Eh bien… que dire ? C’est comme ça. On peut en avoir peur ou pas. Personnellement, je voudrais juste être informé. Je ne sais pas si « avoir peur » est la meilleure façon de réagir.

Dans votre vie, que partagez-vous avec le personnage du « rieur » que vous interprétez ?
Pour répondre, il faudrait que j’aie vu le film car, vous savez, en fonction des coupes on ne sait pas toujours ce qui va rester. Un coup, je peux être le mauvais, et parfois l’inverse…

D’ailleurs, vous jouez souvent des rôles de méchant. Est-ce volontaire ?
Ce n’est pas que je veuille ou pas, mais ce qui me rassure, c’est que le cinéma américain a l’habitude de faire toujours jouer de bons acteurs pour ces rôles. Donc ça me va et je prends le compliment ! Mais ce n’est pas un choix.

Michael Pitt dans une comédie romantique, ce serait possible ?
Mais j’adorerais ! Je ne suis pas du tout contre. Je me pose cette question tellement de fois vous savez… Pourquoi vous ne faites pas aussi jouer les gentils par de bons acteurs [rires] ? Il y a pas mal de pression sur les réalisateurs et c’est comme en peinture, ils ont besoin de fonds pour faire de grands tableaux et du coup, les réalisateurs –surtout aux États-Unis – jouent ce jeu-là : qui va porter le film ? C’est de pire en pire. Ils se foutent d’avoir la bonne personne pour jouer tel ou tel personnage, ils regardent surtout ce qu’un acteur va rapporter. Aux États-Unis, il n’y a pas de fonds destinés au cinéma et c’est difficile d’être un jeune réalisateur. Je comprends qu’ils prennent  les acteurs qui vont rassurer les producteurs.

Tourner avec Scarlett Johansson, c’est comment ?
Très bien ! J’espère qu’elle dirait cela aussi pour moi. Je me rappelle d’elle à New York, il y a longtemps, quand elle tournait le film Manny and Lo (1996). J’avais adoré son interprétation dans Under the Skin, l’un des meilleurs films de ces dernières années.

Enfin, avec qui rêveriez-vous de tourner si tout était possible ?
Avec Stanley Kubrick !

Ghost in the Shell de Rupert Sanders, sortie le 29 mars.

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