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Les gins à toutes les épices

Ils ne cessent de se réinventer, imaginant des recettes toujours plus originales, explorant épices et botaniques en quête d’identité. Les gins se font de plus en plus haut de gamme pour séduire tous les palais et faire oublier une histoire moins glorieuse.

Frédérique Hermine

Le gin so british – devenu ces dernières années muy español – gagne du terrain dans l’Hexagone. Mais il est avant tout d’origine hollandaise avant que le genever ne soit rapporté dans les bagages des soldats anglais après la guerre de Trente Ans au XVIIe siècle. Il était alors bu pour guérir les aigreurs d’estomac, les calculs et la goutte. La boisson, rebaptisée « gin » outre-Manche, est devenue plus récréative, et même un outil politique pour réduire les importations de brandy français made in Cognac. Mais il a fallu attendre le milieu du XIXe siècle et l’invention de la distillation à colonnes pour que le spiritueux très populaire gagne en qualité.

Peu à peu, le London Dry s’est imposé au fil du siècle dernier, notamment grâce au dry martini et au gin tonic. Après quelques années chaotiques où le succès a nui au produit, il s’est offert une nouvelle jeunesse, il y a une trentaine d’années, avec des produits de caractère de plus en plus premium : Bombay Sapphire ; Hendrick’s ; Tanqueray Ten ; Citadelle…

Depuis cinq ans, les flacons fleurissent sur les étagères des bars, des cavistes, et même en grandes surfaces. Les gins ont désormais leurs bars dédiés, comme le Tiger à Saint-Germain-des-Prés ou le Cigale à Lyon, et, depuis l’an dernier, un salon, The Gin Addict. Ils commencent même à intéresser les chefs des restaurants gastronomiques qui ont concocté leur propre breuvage ; un gin aux plantes de montagne pour Emmanuel Renaut de Flocons de Sel, un gin au thé fumé japonais pour Anne-Sophie Pic.

Un grand bouquet de botaniques

Commence alors la course à l’échalote, ou plutôt à l’originalité, pour dénicher épices ; plantes ; fruits et autres botaniques pouvant distinguer le breuvage. Car le gin est soumis à peu de contraintes hormis d’être élaboré à partir d’alcool neutre, de contenir des baies de genièvre et de titrer au minimum à 37,7 % vol. Il peut contenir une pincée ou une grosse poignée de botaniques ; coriandre et agrumes en tête.

Chaque région a désormais son ou ses gins jouant sur les ingrédients locaux pour se forger une identité. Melifera a opté pour l’immortelle de l’île d’Oléron en ingrédient majeur ; Drouin, producteur de calvados normand, a choisi le poiré Domfront pour varier les saveurs ; Denim de Nîmes mise sur la lavande et la salicorne ; LaBouche en Aquitaine sur les coquilles d’huîtres ou les bourgeons de pin ; Anaë produit sur l’île de Ré à partir de baies de maceron et de fleurs de bleuet…

 

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Plus loin, on joue aussi avec les produits locaux et exotiques : ylang-ylang pour le Philippin Santa Ana ; myrtilles pour le Finlandais Arctic Blue ; thé vert et fleur de cerisier pour le Japonais Roku ; 22 herbes de l’île d’Islay en Écosse pour The Botanist ; yuzu et poivre sansho pour le Nippon Nikka Coffey… Reste ensuite à dénicher le bon tonic pour se concocter le parfait gin-to.

Des raisins dans le genièvre

Avec l’arrivée de G’Vine sur le marché en 2006, les amateurs ont pu constater que l’alcool neutre pouvait être vinique et pas seulement à base de céréales. « Nous avons ouvert une nouvelle voie en démontrant que l’on pouvait avoir un véritable point de vue gustatif tout en étant créatif et innovant », ironise Jean-Sébastien Robicquet, fondateur de G’Vine et de Maison Villevert. « Le gin, hors base de grains, reste néanmoins marginal, car le coût de production est plus élevé et l’approvisionnement plus contraignant. »

Sabine et François Lurton, papes du sauvignon, ont également décliné pour leur Sorgin Yellow un distillat de raisin ; nature ou vieilli en barrique afin d’obtenir de la douceur. « Nous voulions en faire un gin qui peut se déguster seul, alors que, la plupart du temps, il se boit en gin-tonic. » À ce jour, il existe à peine une dizaine de produits de ce type (Nouaison et June, également de Maison Villevert ; Osmoz ; Mirabeau ; Léoube ; Thompson’s ; Grappe de Montpellier…). Pas suffisamment pour valider une appellation « gin de France ».

Le début des bios

Peu de gins sont élaborés en bio, la demande restant faible pour les spiritueux. Mais certaines distilleries en ont fait leur cheval de bataille, telles les Charentaises Bercloux et Alcools Vivant ; la Picarde Ergaster ; l’Alsacienne Distillerie de Strasbourg ; Melifera sur l’île d’Oléron ; Anaë à partir de l’île de Ré… « Le bio n’est pas encore une clé d’entrée majeure dans les spis », avoue Jean-Pierre Cointreau, président de la fédération française des spiritueux. « Il permet surtout d’accentuer la dimension culturelle, historique et locale, car les consommateurs ne sont pas encore prêts à payer plus cher. » D’autant que les genévriers aux piquants ardents sont difficilement récoltables à la main, condition sine qua non pour le label, ce qui grève les coûts de production.


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