Amanda Mille, à cent à l’heure

Force et caractère. À la tête de la direction marketing clientèle des montres suisses Richard Mille, mais aussi pilote amateur, la fille du fondateur himself incarne très exactement la devise de la marque horlogère, « une machine de course au poignet ». Entretien.

Judith Spinoza

Amanda Mille, 43 ans, ne se contente pas d’être la fille de. Entrée sur le tard, mais portée par un vrai choix dans le giron de la marque Richard Mille qu’a fondé son père en 2001, initiée par hasard aux sports mécaniques pour lesquels elle s’est prise de passion, l’aînée de la fratrie Mille défend l’image, le caractère et la féminisation d’une maison à la technicité si sensuelle.

Vous êtes à la tête des relations extérieures, Cécile Guenat à celle de la création, la gamme féminine ne cesse de s’étoffer, vous venez de créer la Richard Mille Racing Team, une équipe de course 100% féminine. Les femmes prennent-elles le pouvoir au sein de la maison ?

Je dirais qu’elles prennent leur juste place. Celle qui leur est dévolue. Cela faisait très longtemps que la maison avait à cœur de démontrer que la femme a un rôle essentiel à jouer et que les montres Mille sont bien plus que de jolis accessoires.

Cette équipe de course 100% féminine, la première à concourir en LMP2 (Le Mans Prototype 2), souligne-t-elle le virage féminin de la marque ?

C’est un choix très symbolique qui n’a rien d’un combat féministe. C’est pour mon père, fou de courses, un moyen de donner une réelle opportunité à celles qui désirent sublimer l’art de la conduite au volant.

La Richard Mille Racing Team pendant les 24 Heures du Mans en septembre 2020 © Francois Flamand / DPPI

À l’origine, votre père souhaitait créer LE bijou pour les hommes. En 2005 sort la RM 007, la première montre femme puis en 2018, la marque développe le premier Tourbillon Automatique maison pour la femme, avant l’homme.

Depuis la création de la marque, l’objectif est de développer des montres issues de différents univers, aussi bien pour l’homme que pour la femme. L’obsession de mon père a toujours été de ne pas être uniquement une marque de niche. Au fur et à mesure des années, nous sommes devenus une marque généraliste qui couvre des niches. Des mouvements maison, de nouvelles complications ont été aussi initiées pour les collections mixtes et les collections femmes. La RM 018 Tourbillon Hommage à Boucheron, montre mixte présentée en 2008, utilisait des pierres précieuses et ornementales comme partie intégrante du mouvement. Les pierres s’éloignaient ici de leur rôle principal de décoration pure.

Le tout premier calibre maison, CRMA1, qui anime la RM 037 Automatique, a été créé en 2012. La RM 19-02 Tourbillon Fleur en 2015 était le premier automate et tourbillon volant divulgué par la marque pour une montre femme. La RM 71-01 Tourbillon Automatique Talisman introduisait, quant à elle, le premier mouvement tourbillon automatique maison en 2018. Créer des mouvements maison féminins ou encore une équipe 100% féminine telle que la Richard Mille Racing Team, ce sont à la fois une conviction et des engagements forts de la marque.

La RM 71-01 Tourbillon Automatique Talisman, le premier tourbillon automatique maison femme.

En septembre dernier, vous avez aussi lancé la RM 72-01 Chronographe Lifestyle Maison, une pièce mixte…

Je pense que cela est venu naturellement. Il n’y a pas toujours un besoin de « genrer » des produits, c’est finalement souvent la clientèle qui s’approprie les collections. Il est vrai que la RM 72-01 était voulue comme un modèle « à partager ». Mais certaines pièces comme les RM 037 et RM 07-01 restent bien plus féminines pour répondre à une demande de la clientèle : des montres aux lignes plus douces, une « ode à la femme », des pièces aux lignes plus fines, pour mettre en valeur les poignets de nos clientes.

Premier calibre maison introduit avec la RM 07-01 Ladies

Ce choix est-il une façon de dépasser la féminisation des collections ? De réunir le masculin et le féminin ?

Je pense qu’il s’agit tout simplement d’une envie de partage autour d’une montre. Nous garderons quoi qu’il arrive des développements féminins, comme nous pouvons avoir des collections masculines. Finalement, notre plaisir est de créer des montres à vivre, des objets qui suscitent des émotions à notre clientèle, et peu importe qu’ils se plaisent à porter les montres femmes ou hommes, du moment qu’ils les portent fièrement.

Quelle empreinte vous et vos frères, la seconde génération Mille, comptez-vous perpétuer ?

Comme notre père nous a laissé choisir notre voie professionnelle et n’a jamais insisté pour que nous travaillons avec lui, chacun de nous a trouvé sa place et son rôle naturellement. Nous avons à cœur de sublimer ce qu’il a créé, tout en nous assurant d’une forme de continuité. C’est assez fluide car mes frères (Guillaume, Dimitri et Alexandre) et moi avons fait le choix de rejoindre la marque au bon moment pour chacun d’entre nous.

Vous ne pensiez pas travailler pour Richard Mille à l’origine ?

Non. Cela s’est fait par un concours de circonstances qui m’a conduite à un vrai choix. Je venais de quitter la France et m’envolais pour une année en famille à Dubaï. À cette époque, le segment femme avait du mal à percer. Mon père et Peter Harrison (CEO Richard Mille Europe, Moyen-Orient et Afrique) ont eu l’idée de créer un service dédié aux femmes au Moyen-Orient et ont pensé à moi pour le diriger. J’ai été séduite par l’idée car j’ai entrevu quel pouvait être mon rôle. Cela avait du sens ! Nous n’avons pas grandi avec l’idée d’utiliser notre nom sans y apporter de la valeur ajoutée.

© Robert Jaso

Pourquoi les clientes de Richard Mille sont désormais attirées par des montres à l’ADN si masculin ?

C’était à l’origine un univers très secret, pensé par mon père comme un bijou destiné à l’homme. Désormais, grâce à des modèles qui mélangent à la fois sophistication et technicité, elles peuvent se l’approprier. Nous leur proposons le même ADN que celui que nous proposons aux hommes.

Justement, comment concevez-vous l’équilibre entre la féminité, l’audace et la technicité qui caractérisent les montres Mille ?

Nous ne pourrons jamais délaisser la technicité et l’audace qui représentent notre marque de fabrique. Trouver cet équilibre n’est pas une difficulté en soi. L’arabesque de nos montres, enroulées au poignet, est par essence sensuelle. D’autre part, les femmes recherchent la technicité autant que les hommes et sont parfois même plus passionnées !

Racontez-nous votre passion pour l’automobile ?

D’abord, c’est une histoire de hasard. Il y a 6 ans, lors d’une course organisée à Abu Dhabi pour nos clientes, j’ai eu l’occasion de conduire aux côtés de Tatiana Calderón qui fait aujourd’hui partie de la Richard Mille Racing Team. C’était ma première course. Elle m’a encouragée parce qu’elle a décelé certaines aptitudes en moi… J’ai poursuivi, en multipliant les circuits avec mon père. Et désormais, je suis mordue de sports mécaniques !

© Francois Flamand / DPPI

La marque soutient également le Rallye des Princesses Richard Mille depuis 2015 comme partenaire titre. 5 jours entre femmes, 8 heures de conduite par jour, y participez- vous ?

Oui, c’est un rallye de régularité au départ de la place Vendôme, et une arrivée historiquement à Saint-Tropez. Cette année, nous devions rouler cap à l’ouest, en direction de la côte bretonne, jusqu’à La Baule. C’est une course avec énormément de technique, très compétitive, mais aussi très sympathique.

Quelle montre Mille portez-vous au poignet ?

J’en ai deux. La première est une RM 016 automatique extra plate, en version titane. La seconde, un prototype qui sortira début janvier…

Lire aussi : Montres de designers

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