« Après-ski » : demain, le ski c’est fini ?

Dans Après-ski, Johann Pellicot, ancien skieur de compétition, et Sophie Rodriguez, ancienne championne de snowboard multimédaillée devenue photographe, détaillent leurs expériences et leurs réflexions sur le tourisme aux sports d’hiver de l’ère post-Covid. En capturant la face cachée de la montagne, ce docufiction, relayé par une exposition à la Bellevilloise, montre la montagne telle qu’elle est et telle qu’elle deviendra peut-être dans un futur proche. Rencontre.

Judith Spinoza

Dans ce docufiction qui se déroule dans le Vercors, vous racontez comment trois urbains explorent les alternatives au ski à cause du manque de neige et de la crise Covid. Quels sont les « chemins de traverses » que vous avez expérimentés ?

Nos personnages, qui ne sont jamais partis en vacances à la montagne, ont pourtant une idée assez précise de ce qui est censé les attendre : des montées, des descentes, des clichés Instagram et des soirées arrosées. Le manque de neige et les rencontres avec les gens du coin vont tout changer et leur permettre d’expérimenter une multitude d’activités alternatives au ski de piste : chien de traîneau, escalade, ski de fond, raquettes, patrimoine et histoire.

Est-ce ce que vous appelez la montagne « accessible » ?

C’est celle que des gens aux origines et aux envies diverses peuvent s’approprier, dans laquelle ils peuvent se créer des souvenirs.

Pensez-vous que cette nouvelle façon de vivre les séjours à la montagne va devenir la norme ?

Malheureusement, tout n’est pas si simple ! En vivant une semaine de microaventure à la place de sa semaine « skis aux pieds », le narrateur a conscience d’être au bon endroit, au bon moment ; de passer des vacances pleines de sens qui font écho à ses aspirations de trentenaire citadin. En même temps, à la fin du livre, il n’a qu’une hâte : revenir dans une station de ski, qu’il y ait plein de neige et pouvoir dévaler les pistes à fond avec ses amis.

Le vacancier jouisseur va-t-il vraiment se muer en vacancier enquêteur, notamment la jeune génération ?

Il ne faut pas opposer les deux. Il n’y a pas de raison que les jeunes générations ne veuillent pas continuer à dévaler des pentes, à danser en altitude, en documentant le tout sur leurs réseaux sociaux. En même temps, cela m’étonnerait qu’ils souhaitent passer exactement les mêmes vacances que leurs parents à skier du samedi au samedi sans sortir des pistes balisées… Rien que leur conscience des défis climatiques qui les attendent les en empêchera.

En tant qu’ancien compétiteur de ski amoureux des pistes et de la vitesse, quel sera selon vous le visage du skieur de demain ? Est-il prêt à abandonner la glisse ?

Ce qu’on observe pour cette saison, par exemple, c’est une hausse de la fréquentation de toutes les stations de ski ; en même temps qu’un engouement exceptionnel pour le ski de randonnée en pleine nature. Je ne suis ni expert ni devin, mais je crois que, tant qu’il y aura des reliefs, de la neige et une offre touristique en phase avec son temps, la montagne continuera à attirer de plus en plus de monde.

Les contacts humains intenses vont-ils prendre le pas sur les sensations extrêmes ?

Je ne sais pas… En tout cas, avec Après-ski, nous avons voulu montrer, Sophie avec ses photos et moi avec mes textes, qu’il y a beaucoup de gens prêts à ouvrir leurs univers ; dès lors qu’on s’intéresse un peu à eux. Ce que vivent les personnages du livre, nous l’avons réellement vécu. On a transformé nos vacances en aventure grâce à une suite de rencontres plus improbables et intéressantes les unes que les autres. Si on n’a pas eu de sensations fortes à proprement parler, c’était ultra satisfaisant d’un point de vue personnel.

Comment va se réinventer l’écosystème lié aux professionnels de la montagne ?

Ces professionnels vont faire comme tout le monde, ils vont s’adapter ! Il y a quelques années, j’ai fait un tour des Alpes dans une vieille Peugeot 104 pour rédiger des guides de stations décalés. Ce qui m’a marqué, c’est que beaucoup de pros des stations sont à la pointe des tendances ; ils innovent constamment pour coller aux aspirations de leurs clients. Cela dit, la championne olympique Marie Dorin, qui est aussi propriétaire d’un hôtel et que nous avons rencontrée pour le livre, a cette phrase qui résume bien le bon sens montagnard : « Faire cracher les canons pour skier sur 500 mètres, je comprends tout à fait et je respecte le fait d’offrir une activité de glisse aux touristes ; mais moi, je ne m’accrocherai pas à ça. »

Après-ski par Johann Pellicot et Sophie Rodriguez. Préface de Tony Parker, aux éditions Glénat, 19,95 €.
Exposition avec les photos de Sophie Rodriguez du 3 février au 27 mars à La Bellevilloise, 19-21 rue Boyer, 75020 Paris. labellevilloise.com

Lire aussi : Le ski est-il en train de muter ?

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